Avant de se lancer dans une préparation théorique et pratique au simulateur, il est important de se poser la question de ce qui est attendu de vous lors d’une sélection au simulateur.
Dans ce domaine, chaque compagnie va avoir ses propres points d’attention. Néanmoins, de manière générale, les attentes sont très similaires et relèvent des compétences de base du pilote professionnel telles qu’elles vous ont été, probablement, présentées en formation.
Attendu n°1 : savoir piloter un avion complexe
La première raison pour laquelle vous allez être testés au simulateur est pour vérifier que les bases que vous êtes censés avoir acquis en formation professionnelle initiale sont bien acquises.
Le premier socle des compétences de bases sont celles du module de base du vol aux instruments : le pilotage assiette/puissance. Vous devez savoir piloter un avion aux seules références instrumentales en pilotant les références primaires que ce sont l’assiette, la puissance et l’inclinaison.
Autant sur un avion comme le DA42 ou le P2006 des oscillations ou des écarts d’un degré ou deux d’assiette peuvent donner lieu à du pilotage d’un niveau tolérable, ce n’est plus le cas sur un avion performant. Et pour être tout à fait honnête, c’était probablement déjà à la limite de l’acceptable sur avion MEP.
Il est attendu de vous que vous sachiez piloter des assiettes/puissance stables et précises avec des corrections adaptées à l’écart lorsqu’il y a un écart.
Le second socle de compétences de base sont celles du circuit visuel ou « scanning » en anglais. Lorsque les bases du pilotage selon les références primaires sont posées, vous devez être capable de gérer votre charge de travail et de rester dans la boucle de ce qui est en train de se passer.
Cela passe par un circuit visuel régulier, efficace et rodé. Sans circuit visuel, on se retrouve à se faire « surprendre » fréquemment par des écarts importants alors qu’il aurait été beaucoup plus simple de les repérer et les corriger lorsqu’il s’agit de petits écarts.
Un écart de 40ft d’altitude demande considérablement moins de charge de travail à corriger qu’un écart de 95ft qui nécessite une correction franche et immédiate en plus du petit coup de stress associé à un quasi-passage hors tolérance.
Le PFD de l’Airbus A320 est particulièrement bien conçu pour vous simplifier la tâche de ce point de vue. Nous verrons cela ensemble lors de votre préparation au simulateur.
Votre circuit visuel vous permet de construire et garder une conscience de la situation essentielle. Dès l’instant où il s’arrête ou se ralentit, votre charge de travail augmentera jusqu’à ce qu’il reprenne.
Attendu n°2 : savoir piloter en IFR
Une fois que nous avons posé les bases du pilotage en assiette/puissance avec un circuit visuel efficace, nous allons pouvoir nous intéresser aux procédures spécifiques au vol aux instruments.
Étant donné le temps plutôt court généralement alloué aux épreuves de sélections sur simulateur, seules les bases des procédures IFR peuvent ainsi être évaluées. En termes de procédures, seules les ILS et la remise de gaz sont habituellement proposées dans ces épreuves.
Plus concrètement, qu’est-ce que cela signifie ? Vous devez connaitre les tolérances du pilotage sur un ILS et les annonces d’écart associées.
Je vous propose une liste non exhaustive de manières très efficaces de rater une épreuve de sélection au simulateur.
🤯 Entamer un début de descente sur un glide hors tolérance du localiser
😶🌫️ Ne pas remettre les gaz en cas de passage hors tolérance glide/localiser
🚨 Passer sous les minimas sans initier immédiatement la remise de gaz
Comme vous le constaterez probablement, les attendus dans ce domaine restent modestes et se cantonnent aux bases élémentaires du vol en IFR.
Attendu n°3 : progresser
Il est important de préciser qu’il n’est pas attendu que vous sachiez tout faire immédiatement correctement. En tant que pilote non qualifié en sélection, les compagnies sont généralement sensibles au fait que votre expérience est limitée de manière générale et d’autant plus sur avion à turbine multi-pilote.
Une fois que vous avez démontré les bases précédemment mentionnées, les évaluateurs souhaitent voir une progression de votre part en cas d’erreur.
Si votre tenue d’altitude est initialement imparfaite car vous n’êtes pas à l’aise dans un avion que vous ne connaissez pas, c’est normal. À partir du moment où cela s’améliore sensiblement au fur et à mesure de la séance, cela sera un signe positif que vous êtes capable de reconnaître vos erreurs et de vous améliorer dans un délai raisonnablement court.
Vos évaluateurs sont conscients et généralement empathiques de votre expérience limitée. Passé un niveau de compétence élémentaire, l’important est surtout votre progression.
Si vous remettez les gaz sur votre première approche car vous êtes hors tolérance ou bien non stabilisés, vous avez non seulement respecté les procédures et les attendus mais vous avez également montré que vous êtes capables de reconnaître vos erreurs et de les assumer.
Vous aurez généralement le droit à une seconde approche qui permettra d’évaluer votre progression. Si cette seconde approche se passe correctement, vous aurez finalement eu l’opportunité de démontrer plus de compétences qu’une personne qui aurait fait tout juste du premier coup.
La manœuvre permettant facilement de tester votre aptitude à progresser est le virage à 45°. Cette manœuvre est intéressante de ce point de vue car elle est inhabituelle sur avion de ligne mais aussi car elle vous sort du domaine de vol stabilisé du fly-by-wire
Attendu n°4 : connaître les procédures transmises
Avec la convocation aux sélections sur simulateur, vous recevrez généralement un document avec un jeu de SOP propres à la compagnie et à l’épreuve qui vous sera proposée.
À partir du moment où ces informations vous ont été transmises, vous devez les connaître et les appliquer. Finalement, il s’agit là du premier item du test même si cela n’apparaît pas nécessairement de manière immédiate.
La connaissance et le respect des procédures est un aspect fondamental du métier de pilote aujourd’hui. Elle permet à la compagnie d’évaluer la confiance qu’elle peut placer en vous.
Ainsi, ils peuvent évaluer votre aptitude à apprendre une quantité de contenu raisonnable dans un temps imparti et votre aptitude à respecter des procédures qui vous ont été transmises. Ce sont deux compétences qui vous seront essentielles pour la suite de votre carrière.
Attendu n°5 : être un PM utile
Jusqu’ici, nous nous sommes principalement concentrés sur des compétences liées à la fonction de PF bien que les SOP ne soient pas spécifiques à ce rôle. Néanmoins, comme il vous sera probablement précisé, vous serez évalués en tant que PF mais aussi en tant que PM.
Une manière très efficace de rater une sélection après une magnifique session de pilotage en tant que PF est d’être un PM absent.
Le rôle de PM est délicat dans le cadre de sélections car les attendus sont posés de manière plus floue que ceux du rôle de PF. En fonction des évaluateurs, des précisions vous seront apportées lors du briefing. De manière générale, il est beaucoup plus facile de pardonner un PM un peu trop proactif qu’un PM quasi-absent.
En tant que PM, vous devez connaître et effectuer les annonces standards décrites dans les SOP mais aussi les annonces des écarts de votre PF. Pas d’état d’âme à ce sujet. Vous n’aidez pas votre PF en omettant les annonces d’écart et vous ne vous aidez pas vous-même en ne respectant pas les SOP.
Les annonces des écarts de votre PF sont indispensables pour l’aider à voir un écart en cas de difficulté. Elles sont aussi indispensables pour démontrer votre connaissance et votre respect des SOP.
Un autre aspect plus informel du rôle de PM mais aussi de PF est l’aspect humain et CRM. Lorsque vous serez au simulateur, les évaluateurs se poseront la question : « est-ce que j’ai envie faire une journée de 12-13h à 4 étapes remplie de galères avec cette personne ? » Votre personnalité sera évaluée sous cet angle basique mais non moins important.
Il est difficile de dresser un inventaire des traits de personnalité désirables dans ce contexte mais si vous arrivez à l’épreuve du simulateur c’est que les entretiens de groupe et individuels vous positionnent plutôt du bon côté. Lors de votre préparation au simulateur, nous vous proposerons des exemples de situation et une évaluation de votre performance en PM.
Conclusion
J’espère que cette discussion sur les attendus vous permet de vous faire une meilleure idée de ce qui sera évalué lors de votre épreuve de sélection au simulateur et de comprendre un peu mieux ce que recherchent vos évaluateurs.
L’objectif de la préparation au simulateur (et la raison pour laquelle elle est si importante) est qu’elle permet de faire le point sur tous ces aspects en dehors du cadre des sélections.
En fonction de nombreux facteurs tels que le temps depuis votre sortie de formation et votre expérience récente en IFR, il se peut que certains aspects aient besoin d’être revus, retravaillés ou fluidifiés. Ce sera d’autant de raisons pour lesquelles cette préparation vous sera bénéfique et autant d’imperfections qui pourront être corrigées sans risque de mettre en péril une opportunité d’emploi.